Contexte

Depuis les voyages de Jacques Cartier au 16^e siècle, les Français connaissent l’existence de l’île de Montréal et les avantages que présente le site. Situé au confluent de plusieurs cours d’eau, l’endroit constitue un carrefour géographique important de l’Amérique du Nord-Est, propice au commerce. L’île est d’ailleurs sillonnée fréquemment par des groupes d’Autochtones. En France, certains ont vent de cette réputation qui leur inspire de grands projets.

Les Iroquoiens du Saint-Laurent

En 1535, lors de son deuxième voyage au Canada, Jacques Cartier fait la rencontre de plusieurs centaines d’Autochtones au village d’Hochelaga, sur le site actuel de Montréal. Sédentaires, ces Iroquoiens du Saint-Laurent pratiquent l’agriculture et cultivent la courge, le haricot et le maïs aux abords du mont Royal. Lorsque Samuel de Champlain revient sur le site d’Hochelaga, plusieurs décennies plus tard, il n’y trouve plus âme qui vive.

Question : À ton avis, pour quelle(s) raison(s) les Iroquoiens du Saint-Laurent ont-ils disparu?

L’objectif de la Société de Notre-Dame de Montréal

Les membres de la Société de Notre-Dame de Montréal rédigent en 1643 un manifeste dans lequel ils exposent et défendent les objectifs du projet de leur projet de fondation.

« Ainsi Dieu, grand amateur du salut des hommes [...] semble avoir choisi cette situation de Montréal [...] pour y assembler un peuple composé de Français et des Sauvages* [Autochtones] qui seront convertis pour les rendre sédentaires, les former à cultiver [...] la terre, les unir sous une même discipline dans les exercices de la vie chrétienne [...] et faire célébrer les louanges de Dieu en un désert, où Jésus-Christ n’a jamais été nommé [...]. »

* Notice sur l’utilisation du mot « sauvage » dans son contexte historique : En Nouvelle-France, les Européens croient que les peuples autochtones possèdent des croyances et des coutumes inférieures. Ce sentiment de supériorité des Européens se manifeste dans leur projet de colonisation et d’évangélisation ainsi que dans le langage qu’ils utilisent pour décrire les peuples autochtones. De nos jours, l’utilisation du mot « sauvage » est considérée comme péjorative et offensante.

De nouveaux propriétaires

En 1663, de nombreux changements surviennent dans l’histoire de la Nouvelle-France. La Compagnie des Cent-Associés, qui gérait la colonie, est dissoute alors que le roi de France Louis XIV décide de reprendre la Nouvelle-France plus directement en main. Cette même année, la Société de Notre-Dame, à bout de ressources, cède la propriété de la seigneurie de Montréal aux sulpiciens qui, en contrepartie, épongent la dette de la Société. Présents sur l’île depuis 1657, les sulpiciens y assuraient déjà l’encadrement spirituel des colons. Après 1663, le rôle de cette compagnie de prêtres ira en s’accroissant dans l’histoire montréalaise.

La traite des fourrures

Si la Société de Notre-Dame-de-Montréal se montre peu intéressée par le commerce des fourrures, les habitants de Montréal, eux, souhaitent participer à cette activité économique si essentielle pour la survie de la Nouvelle-France. Par exemple, lorsque la Compagnie des Habitants obtient le monopole de la traite en 1645, les Montréalistes (comme on les appelle alors) parviennent à y être représentés.

Rapidement, le commerce des fourrures prend un essor remarquable dans la vie économique de Montréal, si bien qu’à la fin du 17e siècle, la petite ville est devenue le centre de la traite en Nouvelle-France. Dans les années 1670, jusqu’à 900 Autochtones viennent participer à la foire annuelle pour échanger leurs fourrures. À la fin du siècle, environ un tiers de la population montréalaise vit directement ou indirectement de ce commerce.

La Société de Notre-Dame de Montréal

« Pour comprendre le contexte de la fondation de Montréal, il faut se replacer dans la France des années 1630. Un mouvement de renouveaux religieux, fait d’exaltation mystique et de désir d’étendre la foi catholique, touche alors une partie de l’élite française, aussi bien dans la noblesse que dans la bourgeoisie. [...]

C’est dans ce milieu qu’évolue le véritable père du projet de Montréal, Jérôme Le Royer de La Dauversière, percepteur d’impôts à La Flèche. [...] Vers 1635, il a pour la première fois l’idée de fonder un établissement missionnaire à Montréal. Son projet se précise à compter de 1639, alors qu’il rencontre à Paris le prêtre Jean-Jacques Olier, futur fondateur des sulpiciens, qui avait en tête une idée semblable. [...] Ils mettent sur pied la Société de Notre-Dame de Montréal pour la conversion des sauvages* de la Nouvelle-France. »

Premiers espoirs

« Au printemps 1642, les « Montréalistes » quittent Québec pour prendre possession de l’île de Montréal au nom de la Société de Notre-Dame et y réaliser le rêve missionnaire de La Dauversière. [...] Aussi, l’arrivée à Ville-Marie de deux bandes d’Algonquins, au printemps 1643, donne aux fondateurs de grandes espérances pour le futur. Soixante-dix-huit autochtones reçoivent le baptême et s’établissent sur l’île. Mais bientôt les rumeurs d’une attaque iroquoise imminente les poussent à fuir à Trois-Rivières. En 1645, des pourparlers de paix entre les Français et les Iroquois encouragent d’autres bandes d’Algonquins, notamment les Onotchataronons, à s’installer à Ville-Marie. Cette fois, on baptise 28 individus. Mais l’accord de paix trop fragile, la reprise des guerres iroquoises puis la destruction de la Huronie éloignent à nouveau les autochtones de Ville-Marie et les baptêmes se font très rares par la suite. »

Français et Autochtones à Ville-Marie

Dans les premières années qui suivent la fondation de Ville-Marie, les Autochtones viennent spontanément s’établir aux abords de la colonie. Ils apportent leurs fourrures pour les échanger contre des produits européens. Les missionnaires et les marchands en profitent pour en convaincre un certain nombre de se sédentariser aux environs de Ville-Marie. Ainsi, les sulpiciens fondent la mission de La Montagne alors que les jésuites fondent celle de Sault-Saint-Louis sur la rive sud de Montréal. Ces deux missions regroupent des Autochtones semi-sédentaires, à la fois agriculteurs et chasseurs.

Néanmoins, après 1660, leur population et leur importance relative tendent à diminuer. Cela est dû en partie aux épidémies qui affectent les Autochtones, mais aussi au petit nombre de nouvelles arrivées dans les missions.

Les fondateurs

Pour mener à bien son projet missionnaire, la Société de Notre-Dame recrute Paul Chomedey de Maisonneuve et Jeanne Mance, que l’on considère aujourd’hui comme les cofondateurs de Montréal.

Maisonneuve occupe les fonctions de gouverneur de Ville-Marie, nom que reçoit la nouvelle fondation. Son mandat consiste à établir une colonie composée de Français et d'Autochtones convertis au catholicisme. Pour cela, il concentre entre ses mains les pouvoirs militaires, civils et judiciaires. C’est lui qui concède des terres aux colons, notamment des terres agricoles.

Il est secondé par Jeanne Mance, une infirmière laïque chargée de fonder un Hôtel-Dieu dans la nouvelle colonie. Érigé en 1645, cet établissement demeure l’unique hôpital à Montréal jusqu’en 1822.