Le commerce de la fourrure en Nouvelle-France

Le commerce des fourrures occupe une place centrale dans l’économie et le développement de la Nouvelle-France. À Montréal particulièrement, des marchands-équipeurs se spécialisent dans l’organisation d’expéditions vers les régions des Grands Lacs afin de faire la traite des pelleteries avec les Autochtones. Certains se bâtissent ainsi de véritables fortunes. La Conquête de la colonie par les Britanniques dans la seconde moitié du 18^e siècle a forcément un impact sur cette activité économique. Génère-t-elle davantage de changements que de continuités?

Le nuage de mots ci-contre donne un portrait de la traite des fourrures pendant le Régime français. La taille des lettres est proportionnelle à l’importance de chacun des concepts dans cette activité commerciale. Utilise tes connaissances antérieures pour expliquer comment le nuage de mots illustre le commerce des pelleteries en Nouvelle-France.

Après la Conquête

« Après la Conquête, la fourrure continua de tenir le premier rang dans les exportations. Pendant les années 1760 et 1770, des trafiquants de Montréal poussèrent toujours plus loin à l’intérieur. [...] La structure de base de la traite des fourrures resta inchangée jusque dans les années 1780, et les marchands francophones continuèrent d’y jouer un grand rôle. [...]

En raison des distances de plus en plus grandes, il fallait des capitaux et un crédit accrus, dont disposaient seuls les plus gros marchands anglophones [...]. Ces négociants formèrent la North West Company [Compagnie du Nord-Ouest] et, à la fin des années 1780, ils dominaient le commerce à partir de Montréal. »

Les voyageurs

« Les voyageurs furent les “prolétaires” de la traite des fourrures au départ de Montréal, depuis les années 1680 jusqu’aux années 1870. En tant qu’employés à contrat, les voyageurs transportaient - surtout par canoë - de grandes quantités de fourrures et de marchandises entre Montréal et les postes de traite situés loin à l’ouest et au nord de l’Amérique du Nord, et commerçaient avec de nombreux peuples autochtones différents, surtout dans les villages et les campements de chasse [autochtones]. À leur apogée, au cours de la décennie 1810-1821, jusqu’à trois mille employés travaillaient pour la traite en tout temps. »

Carte du territoire de la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH)

En raison de la charte de fondation accordée par le roi d’Angleterre en 1670, la CBH était la seule qui pouvait faire le commerce des fourrures sur le territoire qui lui était réservé. Ce territoire, appelé «Terre de Rupert» ne faisait pas partie de la Nouvelle-France. La CBH se contentait généralement d’attendre que les Autochtones viennent lui porter les pelleteries dans les comptoirs qu’elle a installés aux embouchures des grands affluents.

Après sa fusion avec la Compagnie du Nord-Ouest en 1821, la CBH privilégie l’itinéraire d’échange de la Baie d’Hudson (en rouge) pour envoyer les fourrures vers l’Angleterre. Cette route se révèle en effet plus économique. Par conséquent, Montréal perd le rôle primordial qu’elle occupait dans le commerce des fourrures.

Chronologie du commerce des fourrures après la Conquête

1670 - Création de la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH)
Le roi d'Angleterre accorde à son cousin, le Prince Rupert, et à ses associés le monopole de la traite des fourrures sur toutes les terres dont les rivières se jettent dans la Baie d'Hudson. La compagnie du Prince Rupert et de ses associés prend le nom de Compagnie de la Baie d'Hudson (en abrégé CBH) alors que le territoire entourant la Baie d'Hudson son désignées par le titre de Terre de Rupert. Ce territoire ne faisait donc pas partie de la Nouvelle-France avant la Conquête.

1783 - Création de la Compagnie du Nord-Ouest (CNO)
Des marchands montréalais d'origine britannique s'associent pour créer la Compagnie du Nord-Ouest (CNO) afin de faire concurrence à la Compagnie de la Baie d'Hudson (CBH). Pendant plusieurs décennies, les deux compagnies se livrent un féroce compétition.

1793 - Mackenzie atteint la côte ouest du Canada
En 1793, Alexander Mackenzie traverse les Rocheuses et atteint la côte ouest du Canada à Bella Coola pour le compte de la Compagnie du Nord-Ouest (CNO). Cet explorateur canadien d'origine écossaise est le premier européen à traverser entièrement le continent américain.

1821 - Fusion de la CNO et de la CBH
Après des décennies d'intense concurrence, la Compagnie du Nord-Ouest et la Compagnie de la Baie d'Hudson fusionnent et gardent le nom de Compagnie de la Baie d'Hudson. Elle devient ainsi l'organisation la plus puissante en Amérique du Nord.

Les exportations du port de Québec (1739-1810)

Les premières années après la Conquête

« Pendant longtemps, les Canadiens français vont conserver dans le trafic des pelleteries la supériorité du nombre. De 1763 à 1774, ils constituent 75,6% des effectifs commerçants engagés dans ce secteur capital. [...] La supériorité anglaise ne fut donc pas acquise d’emblée; elle fut le résultat d’une évolution. Les cautionnements indiquent que déjà en 1767 cette évolution prenait forme. Les Canadiens ont 87,1% des effectifs commerçants, 85,2% des canots, mais les Britanniques financent 56,8% des expéditions. »

La Compagnie du Nord-Ouest

« La compagnie du nord-ouest [...] n’a cependant point de privilège [c’est-à-dire de monopole]; [...].

Autrefois, plusieurs milliers de sauvages* [Autochtones] apportaient eux-mêmes au grand portage leurs pelleteries. Aujourd’hui la compagnie envoie ses agents dans l’intérieur des terres jusqu’à la profondeur de mille milles [plus de 1600 kilomètres], et il arrive que ces agents y restent quelquefois deux ans avant de revenir au grand portage avec leurs achats. La compagnie emploie environ deux mille personnes pour ce commerce intérieur, et le pays est si stérile, que tout ce qui est nécessaire au vêtement et à la nourriture de ces employés est tiré de Montréal. »

* Notice sur l’utilisation du mot « sauvage » dans son contexte historique : En Nouvelle-France, les Européens croient que les peuples autochtones possèdent des croyances et des coutumes inférieures. Ce sentiment de supériorité des Européens se manifeste dans leur projet de colonisation et d’évangélisation ainsi que dans le langage qu’ils utilisent pour décrire les peuples autochtones. De nos jours, l’utilisation du mot « sauvage » est considérée comme péjorative et offensante.

Voyageurs de la Compagnie de la Baie d’Hudson passant devant une cascade

Après la Conquête, les voyageurs continuent d’utiliser les «canots de maître» fabriqués dans la colonie depuis la seconde moitié du 18e siècle. Ces canots de 11 à 12 mètres de long peuvent contenir 8 à 12 personnes en plus d’une charge de 2300 kg. Ils peuvent parcourir jusqu’à 140 km en une journée de 18 heures.

York Factory

Situé à l’embouchure de la rivière Nelson, aux abords de la baie d’Hudson, York Factory a été l’un des postes de traite les plus importants de la Compagnie de la Baie d’Hudson et son entrepôt principal jusqu’en 1850. Il assurait le lien entre l’Europe et les ressources en fourrures de l’intérieur des terres. De plus, des tribus autochtones installées aux abords de York Factory ont longtemps assuré l’approvisionnement de la Compagnie en pelleteries en échange de marchandises européennes (fusils, poudre à fusil, couvertures, marmites, eau-de-vie, etc.).